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Avec le projet PIREDD Plateau, la forêt retrouve sa vitalité dans le Mai Ndombe

Un vent de renouveau forestier et agricole est en train de souffler dans quatre Territoires de la Province du Mai Ndombe grâce au projet PIREDD Plateau

Un vent nouveau dans la province du Mai Ndombe

Entre les forêts et les savanes de la Province du Mai Ndombe, dans ce qui était connu il y a quelques années comme le District des Plateaux c’est-dire les actuels Territoires de Mushie, Kwamouth, Bolobo et Yumbi, dans l’ouest de la République démocratique du Congo, un vent d’un renouveau forestier et agricole est en train de souffler.

Ici, comme dans beaucoup d’autres régions du Congo, les feux de brousse, la culture itinérante sur brûlis et la fabrication traditionnelle du charbon de bois exercent sur la nature une pression qu’on ne peut plus laisser se perpétuer sans réponse.

Depuis septembre 2024, un projet s’est donné pour objectif d’inverser cette tendance et de faire retrouver aux paysages forestiers leur ancienne vitalité : le PIREDD Plateau, soutenu par le Fonds National REDD (FONAREDD), financé par l’Initiative pour les Forêts d’Afrique Centrale (CAFI), appuyé par UNOPS et mis en œuvre par le WWF.

Ce projet porte une ambition claire : réduire de 15 % la déforestation d’ici 2027. Après une première phase menée de 2016 à 2019 qui a vu la plantation de 4 000 hectares en agroforesterie , la nouvelle étape ambitionne de planter 2 090 hectares supplémentaires, de renforcer l’encadrement des agriculteurs  et de réaliser des infrastructures qui impacteront la vie des habitants.

Les leçons du village Bosiki : du manioc au charbon durable

À Bosiki, un village au milieu du Territoire de Mushie, Mbo Nkumimpani, responsable du Comité de développement local (CLD) se souvient des débuts du projet.

« Le projet nous a appris à ne pas nous contenter de cultiver comme avant », raconte-t-il, le regard tourné vers une rangée d’acacias avec leurs troncs dressés vers le ciel. « Nous avons appris à mélanger nos cultures avec ces arbres, et aujourd’hui, nous en voyons les avantages. Nous récoltons le manioc, et avec les acacias, nous fabriquons du charbon de bois. Nous avons découvert une nouvelle source de revenu, tout en protégeant la forêt alentour. »

Ces plantations d’acacias, cultivées pour produire un charbon de bois durable, permettent de réduire la pression sur les forêts naturelles. offrant un équilibre entre production et régénération.

Quand le feu rôde : la vigilance des gardiens de la savane

Mais la route vers le renouveau n’est pas sans embûches. Le feu, ennemi invisible, rôde toujours dans les savanes. Felly Bantsabaru, président du Comité agricole rural de gestion (CARG) du village de Nkoo, dans le Territoire de Bolobo, évoque la douleur et la frustration vécues en voyant les arbres brûlés, souvent sans raison valable si ce n’est par pure malveillance.

« Certaines personnes ont brûlé les acacias, et cela nous a causé beaucoup de peine », confie-t-il. « Il faut sensibiliser sans cesse. Certains comprennent, d’autres non. Parfois, il suffit d’un passant qui jette le feu pour que tout parte en fumée. »

Pour Felly, la sensibilisation est une lutte permanente, aussi importante que la plantation elle-même. Réunions trimestrielles, discussions de village, visites de parcelles : sont des armes essentielles pour protéger les arbres du feu.

Créer des coupe-feux et protéger les savanes : la mise en défens

Au village Lobobi, Mme Philo Ekofa veille sur sa savane comme sur un trésor.

« J’ai commencé à faire des coupe-feux tout autour de ma plantation », explique-t-elle. Nous avons appris lors de la précédente phase du projet ce qu’on appelle la mise en défens des savanes».

A travers la mise en défens les savanes sont protégées du feu, fermées temporairement à l’exploitation, pour permettre à la nature de se régénérer.

Mme Philo Ekofa ajoute : « nous avons aussi formé un groupe anti-incendie de 25 personnes. Quand un feu éclate, nous courons l’éteindre. »

Cette idée, a été transmise par des pairs, lors d’une formation assurée par un autre projet du WWF mis en œuvre avec succès depuis 20 ans dans la province du Kongo Central (anciennement connu sous le nom de Bas-Congo). Les jeunes du village, choisis pour leur énergie et leur courage, sont devenus les gardiens des savanes mises en défens —

La mise en défens est un moyen de laisser la nature démontrer son potentiel de régénération. Les savanes sélectionnées pour cette pratique sont des forêts qui au fil de l’exploitation humaine se sont dégradées en devenant des savanes. En choisissant de laisser la savane  momentanément en dehors de toute exploitation et de la protéger contre le feu, la forêt renaît à elle-même, ramenant la fertilité des sols et la biodiversité perdue.

Récompenser ceux qui protègent la forêt : les PSE en action

Un an après avoir protégé 765 hectares de savane, Mme Philo reçoit une bonne nouvelle :

« On nous avait dit que si notre savane restait protégée, nous recevrions un appui. Nous avons reçu 3 825 dollars », raconte-t-elle, souriante.

C’est le principe des Paiements pour Services Environnementaux (PSE) : une transaction volontaire où les communautés locales sont rémunérées pour leurs efforts concrets de préservation. Contrairement à une subvention classique, le paiement n’est versé que si les résultats sont vérifiés. Les PSE allient ainsi les efforts pour la préservation des écosystèmes et l’appui au bien-être des communautés.

Le projet travaille en sorte que les PSE, déjà mis en place dans la première phase, aient un impact encore plus tangible au cours de la phase actuelle, sur les revenus des communautés et le développement local.

L’acacia au cœur de nouveaux systèmes agricoles

Dans les champs des Territoires de Bolobo et de Mushie, l’acacia est au cœur de système agricoles aux bénéfices multiples. Un membre du CLD Bosiki résume cette alliance naturelle entre acacia et manioc: « quand l'acacia grandit avec le manioc, il enrichit le manioc et il pousse mieux. Nous planterons toujours les deux ensemble. »

Bokatola Bovic, éleveur bovin et président du Comité local de développement (CLD) du village de Mpelu explique les avantages de la production des acacias en montrant des acacias plantés il y a 8 ans grâce au projet PIREDD Plateau: « Ces arbres ont été plantés en 2017 lors de la première phase du projet. Maintenant qu’ils ont grandi nous produisons du charbon de bois avec. Pour poursuivre la production, nous avons plusieurs plantules dans les pépinières qui nous permettront de les replanter et d’avoir encore des acacias dans 8-10 ans et de produire du charbon de bois ».

A travers l’action du projet PIREDD Plateau, entre manioc et acacia, entre agriculture et transformation naturelle des savanes, le Mai Ndombe recrée les conditions de la vitalité de ses paysages naturels. Sur ces terres, souffle désormais la promesse d’une coexistence durable entre l’homme et la forêt.